La tamiserie

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, l’histoire devient amnésique quand il s’agit d’artefacts utilisés dans la vie quotidienne, et de certains métiers de l’artisanat qui cependant plongent leurs racines dans la nuit des temps. Néanmoins, des bribes en ont cependant traversé le cours des âges : les sources, bien avares, font écho de l’existence du tamis dans l’ancienne Egypte et la Grèce antique, alors que les Romains ne le connurent que tardivement ; mais rien, semble-t-il n’a filtré à propos des pays numide et libyque.

La tamiserie

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, l’histoire devient amnésique quand il s’agit d’artefacts utilisés dans la vie quotidienne, et de certains métiers de l’artisanat qui cependant plongent leurs racines dans la nuit des temps. Néanmoins, des bribes en ont cependant traversé le cours des âges : les sources, bien avares, font écho de l’existence du tamis dans l’ancienne Egypte et la Grèce antique, alors que les Romains ne le connurent que tardivement ; mais rien, semble-t-il n’a filtré à propos des pays numide et libyque. La rue des teinturiers dans la médina de Sfax, qui part de Bab-Jebli et aboutit à souk Er-Rbaa, abritait jadis les ateliers et commerces des tamisiers. Il fut un temps où ce corps de métier envahissait les échoppes du souk de la laine, mais cela ne dura pas longtemps, car le travail manuel de la laine aussi bien que la fabrication traditionnelle des tamis tombent désormais et progressivement en désuétude. La confection d’un tamis est un travail très laborieux ; il exige l’acquisition d’un savoir-faire complexe où s’enchevêtrent plusieurs techniques. Le tamis est une passoire qui sert à cribler la mouture des grains. Ayant la forme d’un cylindre, son cadre est en bois de hêtre que les artisans sfaxiens achetaient autrefois à Tunis ; son diamètre est d’environ 40 cm sur une hauteur de 10 à 11 cm et une épaisseur d’environ 5 mm. A l’aide d’une percette à toupie mobile (mechaab), mue par un archet, le tamisier perce une série de trous nécessaires au passage des fils qui formeront la grille (roqaa) de maillage plus ou moins fin. Celle-ci est traditionnellement tissée à partir d’intestins bovins, utilisés après traitement, ou de fines lanières découpées dans une peau de mouton ou de chèvre, que l’artisan tord en s’aidant d’un rouet (raddâna), obtenant de la sorte des fils solides et à l’épaisseur voulue. Tel un tisserand, le tamisier procède ensuite à l’ourdissage de la chaîne (sadwa) de la grille, qu’il sépare en deux nappes grâce à un jeu de lices en fer (nira, swifa…), puis il entreprend de faire passer les fils de trame grâce à une navette en forme d’aiguille (sahm). La grille une fois montée, il en régularise le maillage à l’aide d’une aiguille qui ramène ou repousse les fils à fin d’obtenir des mailles régulières ; il s’agit là d’une opération qui demande beaucoup de patience et de dextérité. La dernière opération consiste à doubler le fond du tamis à fin de masquer l’écartement des fils de chaîne en cousant une bande étroite de cuir d’environ 3 cm de large à l’intérieur, et une autre à l’extérieur du cadre. Aujourd’hui, la grille en métal ou en nylon est de plus en plus utilisée. Les principaux types de tamis utilisés sont classés selon le calibre de leur maillage, des plus déliés aux plus fins.


1- le ghorbèl saqqât appelé aussi ghorbèl zaïtoun, utilisé surtout pour le calibrage du m’hammas : de fines boulettes en grains de semoule agglutinés ;
2- le ghorbèl cha’ir (à orge) ou ghorbèl qamh (à blé), servant à séparer le son de la farine après la mouture des céréales ;
3- le ghorbèl tchich, employé pour calibrer la semoule d’orge ;
4- le ghorbèl smid, utilisé pour calibrer la semoule et le couscous ;
5- le ghorbèl mâlti se distingue par une grille importée de Malte ou fabriqué à Tunis  en crin de cheval ou tissée mécaniquement, ce qui lui confère un aspect en damier.

En Tunisie, pays du couscous, le tamis représentait un ustensile culinaire incontournable, puisqu’il intervenait dans toutes les étapes du processus en amont de sa préparation ; il permettait de calibrer la semoule de blé qui serait roulée puis les grains de couscous lui-même. Le travail du tamisier connaissait un regain de vitalité pendant la saison estivale, en prévision de la tradition annuelle de préparer les provisions en denrées alimentaires à base de céréales, blé et orge (‘oula), une fois la récolte engrangée.

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